R. Bardet (à gauche) et T. Pinot (à droite) ne s'entendent pas et sont battus - Crédit : Eurosport |
[ANALYSE] C’est à croire que le
Tour de France a proféré une malédiction sur les propres enfants de son
territoire. Thibaut Pinot et Romain Bardet n’avaient que 1 300 mètres à
parcourir pour gagner. Mais le Britannique Steve Cummings les a coiffés sur le
fil. Débriefing vidéo dans la voiture de la FDJ.
Cette année, seul Vuillermoz est passé entre les gouttes du
déluge de revers qui s’abat sur les coureurs tricolores depuis Utrecht. Ce
samedi, il n’aura fallu que quelques centaines de mètres pour vivre une
nouvelle désillusion. 178.5 km au menu d’une étape qui ne pouvait que ravir les
baroudeurs entre Rodez (Aveyron) et Mende (Lozère).
Parmi eux, on compte bien des déçus de ces deux premières
semaines : Rolland, Pinot et Bardet pour les Français ; pour les
autres, Uran, Talansky, S. Yates ou Hesjedal mais aussi le maillot vert Peter
Sagan, toujours à la recherche de sa première victoire d’étape cette année sur
le Tour.
La dernière difficulté n’a rien des montagnes titanesques
des Pyrénées. C’est une bosse. Mais une bosse cruelle. La côte de la Croix
Neuve, 2e catégorie. Trois kilomètres féroces à 10% de moyenne avant
une petite descente d’un kilomètre et enfin un faux-plat montant de 700 mètres en
guise de conclusion.
Dans cette impitoyable ascension, c’est Romain Bardet qui
avait très clairement les meilleures jambes. Par trois fois, le grimpeur de
poche d’AG2R attaque. Chaque offensive a le mérite de faire le tri parmi les
prétendants. Thibaut Pinot n’a lui pas cette capacité assassine d’accélérer. Il
se contente d’augmenter la cadence « au train » comme on dit, assis
sur son vélo.
Bardet attaque par trois fois, Pinot résiste au train
Au sommet de la côté, Pinot parvient ainsi à faire la
jonction avec Bardet. Il reste 1.5 km et les deux hommes sont exténués, marqués
sans doute par tous les déboires des jours précédents. Les chutes, les avanies,
les innombrables humiliations subies s’effacent alors que le parfum de la
victoire, de la revanche flotte enfin dans l’air de la Lozère.
Bardet et Pinot ne rattraperont jamais Cummings qui file vers la victoire à Mende - Crédit : Eurosport |
Mais alors que les deux compères semblent presque savourer
de s’adjuger l’étape entre eux, ils se retournent. Un simple coup d’œil de
vérification. Misère ! Voilà qu’un troisième larron surgit en haut de la
pente ! La souffrance et la rage déforment le visage de Stephen Cummings,
seul autre survivant du terrible traitement infligé par Bardet dans la montée.
C’est là, en deux cents mètres, que les deux Français
perdent tout. Ils paniquent. Car en une fraction de seconde, ils comprennent
que, Cummings étant plus rapide au sprint qu’eux, ils doivent à tout prix
prendre de la marge.
Mais Bardet et Pinot n’arrivent pas à se mettre d’accord. Le
deuxième implore le premier de prendre des relais pour distancer le puissant
rouleur britannique (1m90, 75 kg).
Tergiversations. Hésitations. Cummings les rattrape déjà et attaque,
assis, dans la descente vers Mende. Bardet et Pinot s’accrochent comme des
morts de faim mais leur espoir s’effrite. Avant le dernier virage qui mène au
sprint final, les deux hommes comptent déjà 50-60 mètres de retard. Ils ne
reviendront jamais. Bardet s’en frappe le casque de rage.
La première victoire pour une équipe africaine sur le Tour
Stephen Cummings offre lui la première victoire de l’histoire
du Tour de France à une équipe africaine, le team MTN-Qhubeka. Son troisième
succès personnel en World Tour après une
étape du Tour de Pékin et une de la Vuelta
(2012).
Nouvelle déception dans le clan français. Peut-être la plus
frustrante. Vendredi déjà, je vous donnais les
éléments qui selon moi permettaient d’expliquer la déroute française durant
cette Grande Boucle.
Trop de pression. Une grosse chaleur. Beaucoup de chutes.
Des équipes pas au niveau pour entourer leur leader. Mais pourtant, Romain
Bardet allait mieux dans la dernière étape des Pyrénées jeudi puisqu’il avait
fini troisième de cette étape-reine derrière Rodriguez et Fuglsang.
Pinot n’était lui pas de l’échappée mais il avait tenu face
aux attaques répétées des rivaux de Froome dans l’ascension du plateau de
Beille. Au final, le Franc-Comtois avait même terminé dans la roue du maillot
jaune et de Nairo Quintana.
Les jambes et le moral paraissaient retrouvés. Mais en 1 300
malheureux mètres, les Français ont à nouveau tout perdu.
L'étape dans la voiture de la FDJ - à regarder à partir du timecode : 01'14''.
Le classement de la 14e étape
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