Thibaut Pinot pointe à 6'30'' de Tony Martin au général - Crédit : FDJ |
[ANALYSE] La fin des
espoirs. Le terminus des illusions. Thibaut Pinot a encore laissé échapper
trois minutes durant la 4e étape ce mardi. Alors même que le Tour
vient à peine de retrouver la France, le Franc-Comtois a même perdu tout espoir
de figurer sur le podium. Son équipe, la FDJ, était trop faible.
« Il n'est pas de plus grande douleur que de se souvenir des temps heureux dans la misère. » (La Divine Comédie, Dante)
Héros un temps. Anonyme le lendemain. 3e
du Tour de France l’an passé, Thibaut Pinot avait de quoi ressentir cette vive
affliction décrite par Dante lorsque sa bicyclette a connu deux problèmes
mécaniques, coup sur coup, dans l’avant dernier secteur pavé entre
Fontaine-au-Tertre et Quiévy :
« J'ai eu un
problème mécanique et après c'est parti à bloc [devant]. Quand
les évènements s'enchaînent…, soufflait le leader de la FDJ après la
course. (…) J'aurais pu être dépanné,
mais par qui ? Par Mathieu (Ladagnous), qui fait vingt centimètres de plus
que moi ? J'étais bloqué sur un plateau et voilà. »
Crédit : @philousports
Résultat, une interminable attente avant d’être secouru par la
voiture FDJ et une addition salée de 3’23’’ perdues au final sur les ténors…
« J’aurais pu être
dépanné, mais par qui ? » (Pinot)
Aucun
autre grand leader n’a connu de souci technique sur les pavés si familiers des
amoureux de Paris-Roubaix. Mais aucun
autre grand leader n’était seul dans le groupe de tête. Au final, chaque
équipe a pris le relais à l’avant du peloton pour maintenir son champion dans
les clous ; et on a pu mesurer l’écart qui sépare la FDJ du team Sky de
Froome, des Tinkoff de Contador, des BMC de Van Garderen, des Astana de Nibali
ou des Etixx-Quickstep de Tony Martin.
5e victoire d'étape sur le Tour de France et 1er maillot jaune pour Tony Martin - Crédit : Eurosport |
Pourtant,
un frisson a parcouru l’échine de l’Allemand à peu près au même moment, à une
vingtaine de kilomètres de l’arrivée lorsque celui-ci a connu un ennui avec sa
monture. Mais deux équipiers étaient là pour protéger du vent et ramener dans
le groupe de tête le futur vainqueur de l’étape et nouveau maillot jaune.
Une première semaine test pour les équipes
Voilà
trois jours que l’on constate les fragilités, les failles, pour ne pas dire les
béances de la FDJ de Thibaut Pinot. L’équipe française a été impuissante face
au vent et aux bordures de la 2e étape dimanche. C’est ensuite
en cherchant à replacer son leader que William Bonnet hier lundi a été pris
dans une terrible chute collective. Choqué d’avoir vu son capitaine de plat
aussi lourdement blessé, l’infortuné
Pinot n’a pu que laisser filer les meilleurs avant même l’ascension finale du Mur
de Huy.
Avec en
point d’orgue le contre-la-montre par équipe de dimanche, cette première semaine avait pour objectif de tester la solidité et la
richesse des effectifs de chaque équipe. Où étaient les rouleurs que sont
Vaugrenard, Roy, Morabito (recruté pour épauler Pinot) ou les Chavanel et Démare (censés être à
l’aise sur les pavés) ? Nulle part. Pour le leader français, il faudra
donc se contenter des miettes, c’est-à-dire des étapes de haute montagne car la
forme, on
l’a vu au Tour de Suisse et lors du chrono individuel de samedi, est bel et
bien là. C’est ce qui est d’autant plus rageant.
Nibali a tout tenté pour reprendre du temps
Vincenzo Nibali à l'attaque sur le secteur 3 de Saint-Python - Crédit : Eurosport |
Pour
les quatre cavaliers de l’Apocalypse (Froome, Contador, Nibali, Quintana), il
fallait donc avoir des équipiers pour se protéger du vent, se protéger sur les
pavés et le cas échéant être ramené en cas de cassure. Le tenant du titre,
Vincenzo Nibali a attaqué par trois fois sur les pierres du Nord pour tenter,
comme l’an passé, de reprendre du temps aux autres leaders, fragiles dans l’exercice.
Mais les teams Sky (pour Froome), Tinkoff (Contador), Katusha (Rodriguez) et
même Movistar (Quintana) ont tenu le choc, contrairement
à l’an passé. Aucun leader n’a perdu de temps aujourd’hui à l’exception de
Pinot.
Chaque
grande équipe a pu mesurer l’importance de compter dans ses rangs un grand
rouleur de pavé dans son équipe :
Car eux
mieux que personne savent replacer leur leader devant à l’entrée des secteurs
pavés particulièrement étroits. Vous remarquerez que la FDJ ne possédait aucun
expert de la discipline…
La question des lecteurs : ma réponse à Joseph
C’est
effectivement dangereux mais l’exiguïté des lieux fait parfois partie de la
difficulté. C’est moins vrai en montagne où les gens se rapprochent parce qu’il
n’y a plus de peloton à proprement parler mais des coureurs disséminés ça et
là. Sur les pavés du Tour des Flandres, de Paris Roubaix ou bien sur les côtes
de Liège-Bastogne-Liège, cette étroitesse est en fait ce qui permet de mesurer
la force d’une équipe.
Un
leader isolé éprouvera les pires difficultés à se placer correctement seul, à « frotter ».
On l’a d’ailleurs plusieurs fois vu avec Chris Froome aujourd’hui. Le maillot jaune éphémère a régulièrement dû se replacer et manqué de tomber au contact de
Jacopo Guarnieri (cf. à droite ci-dessous de l'excellent @philousports).
Au
final, il n’y a aucun hasard à voir Tony Martin, membre d’une équipe rompue aux
joutes des classiques ardennaises et flandriennes, remporter l’étape d’aujourd’hui.
Il y avait quatre coureurs Etixx-Quickstep pour assurer la garde rapprochée du
champion du monde de contre-la-montre dont le paviste de haut vol, Zdenek
Stybar, 2e de Paris-Roubaix en avril.
Tony Martin ne s'arrête pas à trois échecs
L’Allemand
a donc attaqué sur un faux-plat montant comme il sait si bien le faire. Derrière
lui, les coureurs se sont regardés de peur de faciliter la tâche d’un sprinteur
(Bouhanni, Degenkolb, Cavendish, Coquard) et c’était déjà trop tard pour
rattraper le meilleur rouleur du monde. Tony Martin pouvait se croire maudit. 3 premières étapes. 3 fois deuxième derrière 3
leaders différents pour moins de 3 secondes à chaque fois.
L’Allemand pourra
méditer cette magnifique citation extraite de La Vierge de Flandre (ce n’est pas une blague) de Hendrik
Conscience :
« Le triomphe appartient à l'homme courageux qui croit et espère ; la postérité devient amie et maîtresse des temps à venir. »
Tony Martin fête la victoire avec son team Etixx-Quickstep - Crédit : @philousports
Le général après quatre étapes (source : LeTour.fr)
Après cette défaite, le Pinot n'était pas noir, il était vert, MWARF MWARF
RépondreSupprimerJ'ai cherché un jeu de mots mais je n'en ai pas trouvé de bon ;-)
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