lundi 6 juillet 2015

La revanche des maudits à Huy

Chris Froome retrouve le maillot jaune, deux ans après sa victoire sur le Tour - Team Sky
[ANALYSE] La 3e étape entre Zélande et Huy a consacré l’excellent départ pris par Christopher Froome et Alberto Contador. Deux favoris maudits l’an dernier qui avaient abandonné lors des 5e et 10e étapes sur chute. Cette fois, le Britannique et l’Espagnol ont parfaitement maîtrisé leur début de Tour.


Froome déjà paré de jaune. Contador 8e au général à 00’36’’ du vainqueur du Tour de France 2013. Le compte est bon. Après les trois premières étapes, deux des quatre cavaliers de l’Apocalypse ont marqué leur territoire. Le 3e larron et tenant du titre, Vincenzo Nibali, est 13e et relégué à 01’38’’ de Froome. Nairo Quintana pointe au 17e rang à 01’56’’.

On a déjà souligné l’intérêt que suscite cette première semaine en raison du tracé de cette édition. Mais si ces premiers jours s’avèrent spectaculaires pour les téléspectateurs, ils tordent les boyaux des coureurs. Comme l’an passé, la nervosité s’est emparée d’un peloton encore frais. Chaque équipe a cherché à mettre son leader dans les meilleures conditions pour ne surtout pas se faire piéger.

L’hécatombe à 60 km de l’arrivée


De ces « frottements » comme on les appelle dans le jargon cycliste, on peut tirer deux enseignements. Le premier, c’est cette terrible chute collective à une soixantaine de kilomètres de l’arrivée. William Bonnet, équipier du meilleur Français Thibaut Pinot, tente de replacer son leader à l’avant de la course alors que les Tinkoff de Contador et les Astana de Nibali ont déjà provoqué une « bordure ».



La roue de Bonnet heurte alors celle d’un coureur de Giant-Alpecin et le Français s’écrase au sol à environ 80 km/h, entraînant avec lui une vingtaine de coureurs dont le maillot jaune Fabian Cancellara. Le Suisse y laisse deux vertèbres et abandonne dans la soirée, à la veille d’une étape où il devait briller demain mardi, celle des pavés. William Bonnet s’est lui fracturé la deuxième vertèbre cervicale et doit être opéré en urgence.

William Bonnet souffre d'une fracture de la 2e vertèbre cervicale - L'Equipe.fr

La deuxième leçon que l’on a pu tirer de cette étape aux atours de Flèche Wallonne, c’est la puissance collective des Tinkoff d’Alberto Contador et des Sky de Chris Froome qui ont placé leur leader en tête au pied du redoutable Mur de Huy pour une ascension finale violente : 1.3 km à 9.6%.

Froome et Contador en force avant les pavés


Après quoi, le Britannique a donné la même impression de puissance que lors de sa récente victoire sur le Dauphiné, parvenant à rester dans la roue de l’impitoyable puncheur Joaquim Rodriguez. Malgré l’impossibilité de battre « Purito », la deuxième place est venue rassurer un Froome revanchard après son Tour 2014 catastrophique :
« C'est dingue d'être à nouveau en jaune. Particulièrement après la déception de l'an passé. C'est très, très agréable d'avoir ce maillot. Je ne m'y attendais pas. C'est formidable. (…) Je suis fier de paraître calme mais je peux vous assurer que c'est très, très nerveux. C'est une grosse bagarre pour les positions dans le peloton. Je dois remercier mes équipiers. Ils bossent dur pour me permettre d'être bien placé et pour me protéger. » (L’Equipe.fr)
Alberto Contador arrive en 12e position de l'étape 3 à Huy - Tinkoff-Saxo

De son côté, Contador, en quête d’un doublé Giro-Tour cette année, a pu compter sur les siens qui ont emmené le peloton à vive allure dans l’avant-dernière difficulté, la Côte de Cherave à sept kilomètres de l’arrivée. Mais le Pistolero a un peu coincé sur le mur final, terminant 12e de l’étape à 18 secondes de Rodriguez :
« Je n'ai pas réussi à suivre Rodriguez et Froome dans le Mur de Huy. Je perds même pas mal de temps, dix-huit secondes. Je disais ce matin (lundi) que ce serait une journée difficile. Je ne me suis pas trompé. On peut perdre sur un kilomètre plus de temps que sur une grande ascension. » Mais, « je ne suis pas inquiet de voir Froome en Jaune. (…) C'est un Tour incroyable. Il y a du stress et de la nervosité tous les jours. C'est chaque année la même chose... et un peu plus chaque année. Il faut toujours être devant pour éviter les chutes. » (L’Equipe.fr)

L’analyse est sans ambiguité. Contador est heureux d’avoir échappé à ces premiers pièges. Déjà vainqueur des Tours 2007 et 2009, l’Espagnol sait qu’on ne gagne pas le Tour de France dès la première semaine mais qu’on peut l’y perdre. La plupart des autres ténors ont perdu du temps ces trois derniers jours.

Deux jours durant, les équipes Tinkoff et Sky ont constamment contrôlé la course et attaqué de manière collective pour faire souffrir les équipes moins affûtées comme Astana, Movistar, FDJ et AG2R. Constamment mieux placés, les équipiers de Contador et Froome ont déjà permis à leur leader de gagner beaucoup de temps en piégeant les autres équipes :

Le classement des coureurs jouant le général trois étapes :
(En jaune, les quatre cavaliers de l'Apocalypse, les quatre grands favoris)

1 – C. Froome (Sky)

3 – T. Van Garderen (BMC) + 00’13’’

7 – R. Uran (Etixx-Quickstep) +00’34’’
8 – A. Contador (Tinkoff) + 00’36’’

11 – W. Barguil (Giant-Alpecin) + 01’07’’
12 – B. Mollema (Trek) + 01’32’’
13 – V. Nibali (Astana) + 01’38’’

16 – A. Valverde (Movistar) + 01’51’’
17 – N. Quintana (Movistar) + 01’56’’
18 – J. Rodriguez (Katusha) + 02’00’’

21 – J.-C. Péraud (AG2R) + 02’07’’
26 – R. Bardet (AG2R) + 02’54’’
27 – T. Pinot (FDJ) + 02’58’’

C’est la très mauvaise nouvelle de ce Tour de France. Les trois meilleurs Français de la dernière édition (Péraud, Pinot, Bardet) ont déjà perdu beaucoup de temps.

27au général, Thibaut Pinot a explosé durant ces deux derniers jours. Vaincue par le vent et la pluie dimanche, la FDJ a cette fois été traumatisée par la chute de William Bonnet, l’un de ceux qui devait protéger Pinot sur le plat. Résultat, le Franc-Comtois, 3e du dernier Tour de France, a explosé dans la côte de Cherave, à sept kilomètres de l’arrivée. Il termine 52e de l’étape à 01’33’’ de Rodriguez et Froome. Pinot a déjà presque abandonné tout espoir de remporter le Tour de France cette année.

Sauf si les pavés viennent rééquilibrer les débats ce mardi entre Seraing et Cambrai. Mais on en doute.

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